Accueil > Question écrite n° 01383 de M. Jean Louis Masson. Sénat 15e législature
Sénat 15ème législature
Question écrite
n° 01383
de M. Jean Louis Masson (Moselle - NI)
publiée dans le JO Sénat du 28/09/2017 - page 2971
Texte de la QUESTION :
Sa question écrite n° 25018 du 16 février 2017 n’ayant pas obtenu de réponse sous la précédente législature, M. Jean Louis Masson attire à nouveau l’attention de M. le ministre de l’économie et des finances sur le fait qu’un colloque « Vétérinaire, professionnel garant du bien-être animal » s’est tenu au Sénat le 24 novembre 2015. Au cours de ce colloque, l’Ordre des vétérinaires français a clairement rappelé le principe selon lequel « tout animal abattu doit être privé de conscience d’une manière efficace, préalablement à son égorgement ». De son côté, la Fédération vétérinaire européenne demande « l’étourdissement pour tous, sans exception ». Or l’abattage rituel est autorisé en France sous prétexte de favoriser des pratiques religieuses d’une très grande cruauté et qui relèvent d’un autre âge. Ainsi, l’égorgement d’un gros bovin dure de sept à dix minutes avant la perte de conscience de l’animal, c’est horrible. En fait, l’abattage rituel est une regrettable dérogation aux règles générales de l’abattage classique, qui imposent un étourdissement préalable des animaux avant leur saignée (Directive européenne n° 93/119 et article R.214-70 du code rural). Pire, certains abattoirs ne pratiquent plus l’étourdissement des animaux, alors même que la viande concernée n’est pas exclusivement destinée aux consommateurs israélites et musulmans. Cet état de fait, parfaitement connu des autorités françaises, est une infraction aux règles régissant l’abattage des animaux de consommation. C’est aussi une violation du principe constitutionnel de la liberté de conscience et de religion puisque des consommateurs n’appartenant pas aux communautés religieuses israélites et musulmanes sont amenés à leur insu, à manger de la viande casher ou halal. En tout état de cause, dans un état laïque, il n’y a pas de raison que sous prétexte de préceptes religieux, on autorise une maltraitance inadmissible à l’égard des animaux. Il lui demande donc si la viande casher ou halal ne devrait pas être obligatoirement étiquetée afin que les consommateurs ne soient pas pris en otage à leur insu.
Transmise au Secrétariat d’État, auprès du ministre de l’économie et des finances.
Texte de la REPONSE :
Réponse du Secrétariat d’État, auprès du ministre de l’économie et des finances
publiée dans le JO Sénat du 11/10/2018 - page 5182
Le code rural et de la pêche maritime (article R. 214-70) et le règlement (CE) n° 1099/2009 du Conseil du 24 septembre 2009 sur la protection des animaux, au moment de leur mise à mort, prescrivent l’obligation d’étourdissement des animaux avant leur abattage ou mise à mort, à l’exception des trois cas suivants : abattage rituel, mise à mort du gibier d’élevage lorsque le procédé utilisé, préalablement autorisé, entraîne la mort immédiate et mise à mort d’extrême urgence. L’autorisation de déroger à l’obligation d’étourdissement, lorsque celui-ci n’est pas compatible avec les prescriptions rituelles relevant du libre exercice du culte, résulte du respect du principe de laïcité inscrit dans la Constitution française. En matière d’abattage rituel, les opérateurs doivent répondre à une obligation de résultat telle que définie dans le décret n° 2011-2006 fixant les conditions d’autorisation des établissements d’abattage à déroger à l’obligation d’étourdissement des animaux et dans son arrêté d’application du 28 décembre 2011 relatif aux conditions d’autorisation des établissements d’abattage à déroger à l’obligation d’étourdissement des animaux. De plus, les exploitants ont l’obligation de tenir à jour un système d’enregistrement permettant de vérifier que l’usage de la dérogation correspond bien à des commandes commerciales ou à des ventes qui le nécessitent. L’abattage sans étourdissement est considéré comme nécessaire, dès lors qu’une partie au moins de la carcasse est destinée au circuit rituel. Les enregistrements sont mis à disposition des services vétérinaires en abattoir qui vérifient la bonne tenue des registres et la concordance entre des lots effectivement abattus sans étourdissement et l’existence de commandes ou de ventes effectivement réalisées. Les obligations en termes d’étiquetage des viandes ressortent du domaine harmonisé des règles d’information fixées par l’Union européenne. Les produits issus d’animaux abattus sans étourdissement préalable sont soumis aux dispositions générales d’étiquetage, de composition et de conformité du règlement (UE) n° 1169/2011 relatif à l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires. Le principe de l’étiquetage obligatoire des viandes suivant le mode d’abattage des animaux n’a pas été retenu lors du vote de ce règlement. L’objectif de la neutralité de l’information délivrée au consommateur est précisé au considérant 50 du règlement (CE) n° 1169/2011 du 25 octobre 2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires : « les consommateurs européens montrent un intérêt croissant pour la mise en œuvre dans l’Union européenne (UE) de dispositions concernant le bien-être des animaux au moment de leur abattage, y compris pour le fait de savoir si l’animal a été étourdi avant d’être tué. Il convient à cet égard d’envisager, dans le cadre de la future stratégie de l’UE pour la protection et le bien-être des animaux, une étude sur l’opportunité de donner aux consommateurs l’information pertinente au sujet de l’étourdissement des animaux ». Cette étude, réalisée en 2015, n’a pas abouti à l’introduction de dispositions complémentaires dans le règlement (CE) n° 1169/2011. Pour autant, les opérateurs qui le souhaitent, peuvent faire figurer de façon volontaire des mentions relatives au mode d’abattage sur l’étiquetage de leurs produits. La CJUE a par ailleurs jugé que l’abattage rituel relevait bien de la notion de « rite religieux » au sens du règlement (CE) n° 1099/2009 du Conseil, du 24 septembre 2009, sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort. Il relève donc du champ d’application de la liberté de religion garantie par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.